Test – Nikon AF-S 58mm f/1.4G

Le mal aimé

Nikon 58mm f/1.4g

Il est de ces objectifs qui ne font jamais l’unanimité entre photographes, et dont le rendu est soit adulé, soit détesté. Lors de sa sortie en Octobre 2013, Le Nikon AF-S NIKKOR 58mm f/1.4g était attendu au tournant avec son tarif de 1779€. Les attentes était très hautes et au fur et à mesure que les tests paraissaient la déception devenait de plus en plus grande : cet objectif n’était pas à la hauteur de son prix, considéré comme complètement injustifié. Les mires photographiées étaient floues…Pire encore le 50mm f/1.8G coûtant près de 10 fois moins cher semblait plus piqué à plein ouverture…

Alors pourquoi diable avoir sorti cette escroquerie?

De la pertinence des tests de mire

Loin de moi l’idée de vouloir contredire ces bons vieux tests sur mire, MTF avec chiffres à l’appui, valeurs de vignettage, distorsion et autres valeurs quantifiables. Je les utilise pour me faire une idée de la qualité des objectifs qui m’intéressent car, dans une certaine mesure, ça donne une idée de ce que peux produire un objectif. Par contre il faut apprendre à juger du matériel en fonction d’autres critères, qui je trouve, au final, vont être parfois plus importants que de simples chiffres : “qu’est ce que ça donne comme cliché quand on l’utilise sur un shoot ce caillou?”

Et franchement…Je crois que la réponse est là en fait. Malgré toutes les critiques incendiaires que j’ai pu lire à droite et à gauche, je n’arrêtais pas d’avoir le souffle coupé quand je voyais des portraits fait avec… Alors je me suis laissé tenter après de longs mois à peser le pour et le contre.

Mon premier test fut au japon alors que je visitais un magasin de photo. Les quelques clichés réalisés sur place m’ont ôté tous les doutes que je pouvais avoir en termes de rendu. J’ai fini par m’en prendre un en rentrant en France. Bien m’en a pris car cet objectif a pour l’heure actuelle produit parmi les plus belles photos de mon portfolio. Oui, vous avez bien lu !

Solene

NIKON D750+ 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/250, f/1.4. Phottix Indra 500 TTL

Un objectif très spécialisé

La philosophie qui est à l’origine de cet objectif n’est pas celle de privilégier le piqué à tout prix, mais plutôt d’optimiser le rendu de manière à obtenir le meilleur compromis possible entre netteté et image globalement plaisante. En optique il est particulièrement compliqué de pouvoir tout optimiser sans que le coût ne grimpe de manière astronomique : les Zeiss Otus à près de 4000€ en sont un parfait exemple, et encore que ça reste des objectifs sans autofocus.

Le Nikon 58mm f/1.4G a un comportement très particulier à pleine ouverture. En effet il tendance à être assez mou entre la distance de focus minimale et une distance d’à peu près 1,5 à 2m, et ce, même au centre. Au delà, le piqué revient en flèche pour être même très impressionnant sur les longues distances. Sa zone de netteté n’est pas plate, mais de type “moustache” qui fait que lorsque vous faites le point sur une zone, vous ne pouvez pas recomposer au risque de voir votre zone de netteté se décaler sauvagement.

L’addition de toutes ces particularités rend donc cet objectif très compliqué à manier pour tout prendre en photo et rapidement. Vous ne pouvez pas l’utiliser comme un 50mm classique sans aller au devant d’une sévère déconvenue et avoir envie de le revendre à la première occasion.

photo J'adooore les Sushis

NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 1600, 1/160, f/1.4. Le piqué n’est pas extraordinaire de près…

“Mais alors, qu’est ce qui te plait sur ce caillou Jef ?”

Alors là, sans aucune hésitation : le rendu général de cet objectif sur les flous. Cet objectif possède l’un des plus beau rendu de bokeh de tous les objectifs que j’ai pu essayer. Les flous avant et arrière sont à tomber, et les zones de transition entre net et flou sont tellement progressives que je soupçonne les boîtiers d’avoir du mal à faire précisément le focus sur la zone la plus nette…Micro-réglages OBLIGATOIRES…

Cet objectif confère à vos clichés beaucoup de caractère et insuffle instantanément cet effet 3D à vos photos. En réfléchissant correctement votre prise de vue en fonction des ses forces et faiblesses, il pourra vous rendre de superbes clichés dans lesquels votre sujet ressortira dans un velouté général à tomber par terre…

Photo chloe grand ecart

NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/4000, f/1.4. GODOX AD600B

Je trouve que de manière générale c’est un peu comme avoir une sorte de 85mm caché dans une focale “normale”. Alors évidemment c’est pas du tout le même rendu, mais les 8mm de plus par rapport à un 50mm classique jouent pour beaucoup dans le rendu général augmentant ainsi l’effet 3D.

Quelle place pour lui dans la série actuelle des 50mm?

En réalité c’est très compliqué de comparer cet objectif à ses deux compères 50mm F/1.8G et f/1.4G dans la mesure où même si la focale est à peu près similaire, les utilisations vont être complètement différentes. En fait lorsqu’on débute la photo on nous conseille la plupart du temps de commencer rapidement avec un 50mm ou un équivalent en focale (genre 30-35mm sur APS-C)  parce que c’est ce qui imite le plus ce qu’on voit à l’oeil nu et que c’est très facile de prise en main, et d’ailleurs je suis très vite passé de mon 18-55mm de kit à un Sigma 35mm f/1.4 sur mon Canon 1100D. Par la suite je n’ai quasiment plus jamais utilisé de zoom de manière régulière…

Dans le cadre des 50mm classiques c’est très bien, le comportement est linéaire, c’est à dire que vous ouvrez, la netteté est au centre et s’amenuise sur les bords, mais la zone de netteté est plate et vous pouvez facilement recadrer en technique focus/recompose. En général ce sont d’excellentes optiques à tout faire et elles vous serviront dans de multiples occasions et pour divers types de conditions. Si je devais mettre un mot sur la différence entre les 50mm et le 58mm je dirais que les uns prennent une photo alors que l’autre vous dessine une photo…Et c’est là la différence : vous n’allez pas les utiliser pour avoir les mêmes rendus. Si vous me demandez : “je pars en voyage, tu me conseilles quoi?” je vous répondrai : “prends un 50mm, le 58mm demande trop de réflexion tu vas être frustré”. Ca ne sert à rien de prendre un 58mm qui va vous rendre la photo de vos sushis flous parce que vous n’aviez pas d’autre choix que d’être à 1.4 à cause de la faible luminosité dans votre restaurant à Kyoto, quelle que soit la beauté du bokeh…Tout est question de besoin. Par contre si vous savez que vous avez besoin de faire un super portrait de votre petite amie pendant une balade en bord de Garonne, alors là oui je vais vous conseiller le 58mm, qui pourra au passage faire de bonnes photos souvenirs des environs !

Evidemment quand on aborde la question du budget, on revient vite les pieds sur terre et le ratio performance/prix vient contre balancer la donne. Clairement le prix de 1779€ est salé lorsqu’on voit les faiblesses du 58mm par rapport à ses petits frères 4x et 10x moins chers qui eux, sont vraiment très honorables pour leur prix…Mais c’est un objectif que vous ne considérerez très certainement qu’après avoir usé et encore usé vos chers 50mm et en avoir vu les limites en termes de rendu.

Photo de moi

NIKON D600 + 50mm f/1.4 @ 50mm, ISO 100, 1/4000, f/1.4. On voit très vite le caractère nerveux de l’arrière plan de la photo avec un 50mm classique

Mon verdict

Le 58mm F/1.4G de Nikon est une optique capricieuse parce qu’elle demande d’être parfaitement domptée pour pouvoir en tirer le meilleur. C’est tout ou rien, soit vous avez un cliché à tomber, soit vous avez un flou généralisé inexploitable…Après vous pouvez toujours shooter à f/5.6 ou f/8 et avoir toujours des photos nettes, mais à ce niveau là je vous conseillerai plutôt d’investir dans un bon vieux 24-70mm f/2.8. Votre argent sera dépensé plus judicieusement…

Il m’a fallu beaucoup de temps pour comprendre comment en tirer de belles choses mais maintenant je n’utilise plus du tout mes 50mm classiques.

Je me suis spécialisé dans la photo de personnes et pour ce besoin là le 58mm est ma focale normale de référence que je prends systématiquement sur moi conjointement au 105mm f/1.4. Je vais l’utiliser si j’ai peu de recul, ou si j’ai besoin d’intégrer plus de fond dans mes compositions. Le rendu très particulier de cet objectif va me permettre d’obtenir des images d’une douceur que lui seul peut apporter tout en faisant ressortir le sujet de l’image.

Si vous êtes en train de vous constituer un parc optique, clairement, le 58mm n’est pas l’optique que je vais vous conseiller en premier parce qu’en termes de ratio polyvalence/prix/performance vous avez des objectifs beaucoup mieux placés notamment dans la focale 85mm. Mais une fois que vous avez ce qu’il faut, si vous cherchez à donner à vos cliché un caractère unique qui va vous différencier un peu de la concurrence, le 58mm vous donnera ce qu’il faut même si le prix est assez salé. Cette optique a été pour moi un coup de cœur et c’est actuellement une des raisons qui me maintient chez Nikon. Les boîtiers vont et viennent au grès des technologies, un coup Canon, un coup Nikon, aujourd’hui Sony…Mais les optiques sont l’âme de vos photos.

Qualité de fabrication
Prise en main
Qualité optique
Bokeh et rendu
Autofocus
Rapport qualité / prix

Mise à jour 2021

Depuis la rédaction de cet article la technologie a pas mal évolué, ainsi que mon matériel. Il se trouve que cette optique couplée au 105mm m’ont fait rester chez Nikon et j’ai pu la redécouvrir grâce au Z6 et la technologie hybride. Finies les photos floues, le focus / recompose impraticable à cause de la zone de netteté en moustache. Finis les micro réglages en fonction des distances de prise de vue. Un pur bonheur, vous visez sur le collimateur, ou vous laissez le boitier détecter l’œil d’un sujet. Et 90% du temps c’est dedans… Comparativement aux réflex où il fallait assurer 5-6 clichés sans être sur d’en avoir un parfaitement net…

Mailys

NIKON Z6 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/200, f/1.4 + Godox AD600 + Octa Luna 110cm + VND filter

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/1600, f/1.4. Phottix Indra 360 TTL, Octa 110cm

Le genre de fond qui ne pardonne pas, pourtant le 58mm a su le rendre avec douceur…

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/2000, f/1.4. GODOX AD600B, Octa 110cm

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 2000, 1/160, f/1.4. Yongnuo 360II, parapluie blanc.

Le cas typique où je sors le 58mm pour intégrer un peu de fond à la composition

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 1000, 1/160, f/1.4.

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 1000, 1/250, f/1.8. Yongnuo 360II, parapluie blanc

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 125, 1/4000, f/1.4. Phottix Indra 360 TTL, Octa 110cm

Même avec des fonds feuillus et chargés le 58mm a un bokeh moelleux

Photo Manon

NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/2000, f/1.4. Phottix Indra 360 TTL, Octa 110cm

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/2000, f/1.4. Phottix Indra 360 TTL, Octa 110cm

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 720, 1/160, f/1.4.

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/2000, f/1.4. GODOX AD600B, Octa 110cm

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 200, 1/250, f/1.4. Yongnuo 360II, parapluie blanc

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/800, f/1.8. Deux Godox V860II TTL, Octa + Softbox Easy up

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/200, f/1.4. Deux Godox V860II TTL, Octa gauche + parapluie blanc droite

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NIKON D750 + 58mm f/1.4 @ 58mm, ISO 100, 1/800, f/1.4. Deux Godox V860II TTL, Octa gauche + parapluie blanc droite